Qui dirige ?

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Il y a des émissions du style « Seul dans la nature » ou « Survivre dans le désert de Gobi » où l’on captive le spectateur avec des rebondissements autour de « Va-t-il trouver de l’eau ? », « Comment ne va-t-elle pas mourir de faim ? ». Jusqu’à ce que l’on se pose la question « Mais qui filme ? ».

Et oui, il y a bien derrière au moins un cameraman et si ça trouve toute une équipe qui n’a pas du tout l’intention de mourir d’inanition ou de souffrir plus que cela.

En l’absence persistante d’un Gouvernement, dont tout le monde se fiche, à commencer par les journalistes dont ce serait le métier de souligner l’anomalie, la vraie question est « Qui dirige ? ».

Il est devenu de bon ton dans les conversations de se dire que finalement cela fonctionne très bien comme ça. Ou qu’il y a des précédents en Belgique où il n’y a pas eu de Gouvernement durant 541 jours. Et que les Belges n’en sont pas morts pour autant.

Il faut indiscutablement mettre le fonctionnement qui « roule » au crédit d’une administration - ou d’administrations au pluriel - qui font tourner la machine quoi qu’il advienne. Comme quoi on peut critiquer les fonctionnaires mais apparemment ce sont bien eux qui permettent à notre pays de ne pas être en roue libre.

La seule chose qu’ils ne peuvent pas faire ce sont des choix ou arbitrages politiques sur tel ou tel sujet.

Mais justement, attardons-nous quelques instants sur ce paradoxe. Voilà des serviteurs de l’État qui font leur travail, l’opinion publique qui exprime une grande défiance vis-à-vis du politique, mais qui « en même temps » (oh misère !) se plaigne de trop de bureaucratie, trop d’administratif, etc.

Il faut savoir ce que l’on veut.

Normalement, en démocratie, il y a des élections et ce sont les élus qui décident. Oui mais… Combien de fois a-t-on entendu tel ou tel ancien ministre raconter qu’à peine arrivé dans son nouveau fauteuil, il se voyait dans l’obligation de signer des dizaines de parapheurs comportant des désignations et des décisions dont il n’était pas l’auteur ?

Cela serait presque choquant si d’une certaine façon la valse des ministres n’aboutissait à un consentement citoyen sur le fait que les politiques ne comptent ni ne pèsent dans la décision publique.

Cette petite musique a plus d’un effet pervers car on pourra pleurer sur le fait que l’on ne tient plus de la décision des urnes mais l’attitude individuelle de chacun d’entre nous y contribue grandement.

Tout système politique, toute organisation ne tient que par ses élus. Si on ne leur donne plus d’importance ou si on traite cela à la légère en faisant primer les opérationnels, il ne faudra pas se demander « qui dirige ? ».

Celui ou celle qui dirige sera quelqu’un que l’on n’aura pas choisi. C’est ainsi que ces systèmes et organisations finissent par perdre toute légitimité et par s’effondrer.

Il sera inutile de venir s’en plaindre ensuite. (Et au passage comprenne qui pourra).

Florence Berthelot

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