Plus vert que vert

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Plus vert que vert

Un célèbre humoriste s’était interrogé il y a longtemps sur les lessives qui prétendaient laver « plus blanc que blanc ». Quelques décennies plus tard, la question n’est pas résolue : moins blanc que blanc c’est gris clair, plus blanc que blanc on ne sait toujours pas.

A écouter certains débats parlementaires, ou certains élus locaux, ou certains candidats, la nouvelle formule qui vient à l’esprit c’est que chacun veut être « plus vert que vert ».
Et encore… Quand on discute avec les représentants des associations ou partis dits « écologistes », on sait à peu près où on va : le camion c’est berk, le rail c’est chouette. Mais si on parvient à ce report modal massif, il faudra aussi penser à la reconversion des entreprises et des salariés du transport routier. C’est un peu basique mais, d’une certaine façon, c’est logique.

Le plus compliqué, c’est avec des élus de partis qui ne se revendiquent nullement de l’écologie, et notamment des élus locaux qui, en off, conviennent qu’il faut faire preuve de réalisme, qui affirment « bien aimer » (sic) les entreprises de transport routier, qui reconnaissent que lors des confinements successifs, ce secteur a véritablement joué son rôle de flux sanguin de l’économie.

Ceux-là mêmes, en débat public, perdent quasi la tête et édictent taxes, interdictions de circuler (sauf desserte locale, parlent « d’itinéraires de fuite », de réductions des « nuisances » (re-sic).

Quand un peu lassé, on revient vers eux, l’argument est à peu près toujours le même. Le camion de chez moi, d’une entreprise locale, est un bon camion. Le camion qui vient d’ailleurs est mauvais. Il doit soit éviter de passer son mon territoire, ou s’il passe, et bien, il devra payer.

C’est cette vision très raccourcie qui finit par amener le summum de la réflexion en matière de politique des transports : « il faudrait taxer les étrangers ». Déjà, et il faut le rappeler sans cesse, taxer les étrangers et pas les locaux, c’est interdit par les traités européens.

Le problème c’est qu’en l’occurrence, l’étranger n’est pas nécessairement espagnol, belge ou polonais. Il peut être breton quand on est en Nouvelle Aquitaine ou rhône-alpin quand on est en Occitanie.

Par nature, l’activité de transport routier a vocation à aller partout et se fiche des pseudo-frontières et encore plus quand elles sont régionales. Refuser les camions ici, c’est prendre le risque que « ses bons camions locaux » soient bannis ailleurs.

Cette dissonance est désespérante, surtout dans une Europe où certains Etats ont délibérément choisi de soutenir sans réserve leur secteur du transport routier, quitte à attaquer devant la Cour de Justice européenne une réglementation visant à rétablir un peu plus de régulation et d’égalité de concurrence.

Il y a fort à parier que, dans quelques années, on soit encore à se demander ce que veut dire être plus vert que vert. (Moins vert que vert ce doit être vert clair).

Florence Berthelot

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