Marche à l’ombre

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Marche à l’ombre

Si on écoute les médias ces dernières semaines, on pourrait avoir l’impression que désormais les lois se passent à coup de « 49.3 » sans débat, avec des motions de censure rejetées etc... etc… C’est méconnaitre le travail législatif. Il y a d’autres lois que le projet de loi de finances ou le projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui sont travaillées par le Parlement et avec des délais moins contraints.

Ce sont des textes qui passent « sous les radars » de l’information. Sachant qu’aujourd’hui tout le monde parle de la réforme des retraites et de rien d’autre.

La loi dite sur les énergies renouvelables fait partie de ces lois en discussion, dont on parle moins. En pleine crise énergétique, elle se veut innovante dans l’accélération du déploiement de l’éolien ou du solaire. A priori, on pourrait penser qu’elle comporte de bonnes idées dans la perspective de sortir des énergies fossiles.

Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions, et les parkings désormais soumis à des obligations d’ombrières. En effet l’article 11 prévoit que dès lors qu’un parking dépasse un certain nombre de mètres carrés, obligation est faite à son propriétaire d’installer des structures photovoltaïques générant d’une part de l’ombre aux voitures et de l’autre de l’énergie électrique.

Vu comme ça, on évitera de rentrer dans des voitures surchauffées l’été, et on pourra produire sa propre électricité. Bon, en même temps, ce sera peut-être plus pertinents dans les régions très ensoleillées que dans celles qui le sont moins, mais passons…

Le hic, c’est qu’à vouloir ratisser trop large, les parkings d’entreprises de transport exploitant des poids lourds, ou encore les aires de stockage des transporteurs de véhicules non encore immatriculés (voitures et camions) seront aussi concernés.

Qui dit ombrières dit nécessairement piliers, et pour couvrir les aires de parkings de camions une hauteur que peu de fabricants ont imaginé. Ceux qui n’ont jamais manœuvré un véhicule lourd n’ont manifestement pas compris que pour se déplacer dans un parking, il lui faut la même chose qu’un éléphant qui a trop mangé. C’est-à-dire beaucoup de place. Et qu’avoir des piliers un peu partout, et bien cela rend le stationnement très, très compliqué.

Le problème avec ce genre de lois, c’est que, quand vous venez avec un petit amendement pour le souligner ou pour sortir les zones de stockage de véhicules d’une obligation générale, vous devenez l’affreux représentant du « lobby routier » hostile à toute démarche de progrès, et suppôt du changement climatique.

Que nenni ! C’est tout simplement du bon sens.

D’ailleurs, les auteurs de la loi sont si sûrs d’eux-mêmes qu’ils ont prévu que c’est obligatoire « sauf si on peut produire de l’énergie autrement » pour ces surfaces ou « sauf si c’est techniquement impossible ». Et comme d’habitude, on renvoie tout à un décret qui renverra tout aux Préfets. On devine déjà une foule de prescriptions administratives du style « hauteur supérieure à 4,82 mètres mais inférieure à 5,02 mètres ».

On a tous le souvenir de ce qui s’est passé pour les autocollants « angle mort » dont personne ne sait si finalement ils ont servi à quelque chose….

Evidemment, personne n’a non plus considéré si les lourds investissements que cela suppose seront rentables. Mais on ne voudrait pas faire de l’ombre au tableau (électrique).

Florence Berthelot

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