Le monde d’aujourd’hui

2min -
Le monde d’aujourd’hui

Les écrivains (enfin les bons écrivains) sont toujours visionnaires. Dans une lettre publiée pendant le confinement, Michel Houellebecq écrivait : « Nous ne nous réveillerons pas, après le confinement, dans un nouveau monde ; ce sera le même, en un peu pire. ». En ce moment, on ne peut pas essayer de « regarder les nouvelles » sans se demander, avec perplexité, si une autre forme de guerre larvée n’est pas venue remplacer la guerre sanitaire. Il semblerait qu’après plusieurs semaines d’isolement, certains expriment leur souhait de retrouver une certaine proximité en se jetant des pierres, en tirant en l’air avec des armes automatiques, en cassant des vitrines ou en brulant des voitures. Sur ce dernier point, on devine que l’objectif n’est pas vraiment de relancer l’industrie automobile. La confusion règne. Le rêve d’une unité nationale face à la crise que nous traversons (et qui va durer) s’éloigne. Il y a beaucoup à dire.

Mais attardons-nous sur une aberration de plus. En prévision du déconfinement le 11 mai, a été diffusé « un protocole de déconfinement » indiquant des procédures aux entreprises assez strictes : périmètre de distanciation de 4m² pour chaque salarié, établissement de zones d’attente pour les personnes extérieures, gestion des espaces de restauration, jusqu’aux doubles poubelles pour jeter les équipements de protection individuelle. Ce protocole doit évoluer dans les tous prochains jours. Par ailleurs, le Conseil d’Etat, par une ordonnance du 13 juin, lève l’interdiction de rassemblement de plus de 10 personnes sur la voie publique, la liberté de manifester étant un droit fondamental. Seulement voilà : comment expliquer que les entreprises engagent leur responsabilité civile et pénale pour n’avoir pas respecté un paragraphe ou une ligne du protocole de déconfinement, alors que par ailleurs on peut aller se contaminer allègrement pour soutenir telle ou telle cause (ou régler ses comptes) ? Comment peut-on aller jusqu’à dire que la COVID 19 sera reconnue en maladie professionnelle alors que la personne qui aura contracté la maladie aura peut-être participé à des rassemblements massifs sur la voie publique ? L’employeur subit perpétuellement des « soupçons avérés » de faute tandis que l’individu est systématiquement déresponsabilisé. Finalement, à part quelques plans de relance, on pourrait se demander si le but n’est pas de faire tourner à plein régime les « commissions d’examen » et les tribunaux. Ou de remplir les cabinets de psychothérapeutes. Toujours la même chose... en un peu pire.

Florence Berthelot

Haut de page