Il faudra assumer les choix

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Il faudra assumer les choix

Michel Audiard disait « Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, les types de 60 kilos les écoutent ». En l’occurrence, cette phrase ne vise pas forcément uniquement le poids physique, mais aussi l’expertise, la connaissance de ses sujets, et l’influence en général.

Depuis quelques temps, malheureusement, c’est de moins en moins vrai, car les fameux « experts de plateaux » pèsent souvent bien moins que les faits qui leur résistent.

C’est pourquoi lorsque, par hasard, les médias donnent la parole à de vrais connaisseurs, on ne peut s’empêcher de tendre l’oreille. Un exemple du genre s’est produit la semaine dernière, sur une des radios les plus écoutées de France, avec l’interview de Carlos Tavares, le Directeur Général de Stellantis.

Après avoir abordé avec beaucoup de finesse la question des profits records de l’entreprise, la redistribution aux salariés et son propre salaire, Carlos Tavares a évoqué la question de la transition énergétique et le véhicule électrique. Cet interview est disponible sur le site de la radio, le lecteur s’y référera utilement.

Mais que dit-il exactement ? Qu’en Europe, le choix d’aller vers la voiture électrique n’est pas une décision des constructeurs. C’est une décision politique qui leur a été imposée. Ceci est déjà en soi assez inédit et le résultat du scandale du « Dieselgate».

Le plus saisissant est ce qu’il dit après : « Il y avait d’autres solutions, plus efficaces pour la planète, moins coûteuses pour les consommateurs et pour les Etats ».

Ça n’a l’air de rien comme ça, c’est une bombinette qui vient d’être lâchée. Ces solutions ne sont pas citées, mais on les devine aisément. La problématique est exactement la même pour les véhicules lourds, à la différence que, s’il existe des usines de construction en France, il n’y a plus de fabricants français de camions.

Pour Carlos Tavares, on a pris le problème à l’envers : il fallait d’abord être en capacité de produire une énergie propre (20 ans), développer les infrastructures d’avitaillement et de recharge (10 ans) et ensuite produire les véhicules (5 ans).

Clairement, l’Europe a décidé d’une orientation tout autre que Tavares qualifie (c’est son opinion) de « dogmatique ». Aujourd’hui, pour tout achat de véhicule, le consommateur devrait lire toutes sortes d’études scientifiques sur le véritable impact environnemental de l’engin, au regard de son cycle complet de vie. Ce qui veut dire que le véhicule électrique n’est pas forcément le mieux placé.

Alors le débat fait rage avec des constructeurs qui ne peuvent pas faire autrement que de promouvoir en dépit du bon sens, le tout électrique généralisé, malgré les prix élevés voire inaccessibles pour les consommateurs (dont évidemment les transporteurs routiers). Ce qui suppose que les Etats (donc tout le monde) mettent la main à la poche pour soutenir la demande, sinon les acheteurs…n’achèteront pas.

« Il y avait d’autres solutions »….

Le media « Contexte » rapport que même l’Allemagne tente de promouvoir, ces jours-ci, les carburants alternatifs mais que la France ne la soutient pas car elle considère que ces carburants doivent être fléchés sur tous les modes autres que le routier, et particulièrement sur l’aérien.

 

Il n’est pas certain que quand le politique se mêle du marché, ce soit forcément mieux. Le marché européen de l’électricité, l’alignement de son prix sur celui du gaz ou l’abandon (ou pas) du nucléaire en sont des illustrations assez douloureuses en ce moment.

Avec cette question des véhicules électriques, au détriment d’un véritable mix énergétique, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a, là, les ingrédients d’une véritable erreur stratégique sur laquelle on risque de se lamenter dans quelques années.

Et alors on dira, peut-être trop tard: « Il y avait d’autres solutions ».

Ceux qui font les choix aujourd’hui les assumeront-ils demain ?

L’expérience aurait tendance à démontrer que la réponse est (malheureusement) dans la question.

Florence Berthelot

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