À notre cher Georges
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Georges Causse nous a quittés le 22 mai. C’est une grande figure de la FNTR qui s’en va. Non seulement il fut coprésident de la FNTR entre 2003 et 2005, non seulement il en fut le trésorier durant de très nombreuses années, mais surtout il était « l’homme de l’international » de la FNTR.
Il contribua à l’ouverture de notre bureau de Bruxelles et occupa plusieurs fonctions importantes au sein de l’IRU. Il présida le Comité de Liaison du Transport de Marchandises, et aussi fort longtemps, la Commission sociale de l’IRU et à ce titre aussi le Comité de Dialogue sectoriel pour la route. Il ne manquait aucune réunion internationale où il a tissé de solides amitiés et fut notre ambassadeur partout où il passait.
Ces quelques lignes ne pourront jamais résumer ni sa vie, de sa jeunesse en Algérie à Transcausse, de Causse-Wallon à son attachement à la Corse, de son engagement dans la Commission Transport de voitures à son ouvrage intitulé « De la nostalgie de fin de siècle », ni sa personnalité érudite et teintée d’un humour très british.
Mais je n’aurai, à titre personnel, jamais les mots suffisants pour exprimer ma gratitude et l’affection que je lui portais. Lors de ma remise de Légion d’honneur, notamment pour mon action européenne, j’eus ces mots pour lui « Georges, vous êtes l’homme dans ma vie avec lequel j’ai passé le plus de temps dans les trains, les avions… et les hôtels ! ».
Nul besoin de préciser que c’était en tout bien, tout honneur.
Cela le fit sourire, avec un soupçon de fierté, car nous savions bien les milliers de kilomètres parcourus, pour l’action européenne et internationale, dans tous les modes de transport possibles (sauf à vélo), avec tous les aléas que cela pouvait comporter, les heures et les heures de conversation sur les stratégies à adopter, mais aussi les souvenirs, les anecdotes et les visions du monde échangés lors de déjeuners ou de dîners. Il y eu aussi de magnifiques fous-rires. (« Vous prendrez bien une piscine de champagne, Florence ? J’aurai trop peur de m’y noyer, Georges »). Nous nous sommes toujours vouvoyés.
À l’international, j’étais une Padawan, son apprentie. Il transmettait, avec une suprême élégance, son savoir, ses connaissances, ses « trucs ». Je l’ai vu réaliser ce tour de force de conclure une réunion, où tous les participants s’écharpaient violemment, par un sublime « je vois que tout le monde est d’accord, c’est parfait », et personne n’apporta aucune objection.
Il rendait fous les interprètes et traducteurs avec des citations ou proverbes kazakh, béninois, ou mongols ou supposés tels. Nous l’avons bien souvent soupçonné d’en inventer une grande partie.
Nous voilà à Budapest dans un grand colloque international, où il conclut par « Ce n’est pas parce que vous mettrez neuf femmes dans une chambre avec un homme que vous aurez un enfant en un mois ! ». En catimini, je lui fis respectueusement remarquer que cela ne voulait pas dire grand-chose et qu’en plus cela n’avait rien à voir avec le thème de la conférence. Il se prit à rire en disant « ils ne risquent pas d’oublier la FNTR maintenant ! »
Même aujourd’hui, quand je ne parviens pas à trouver une solution à une difficulté, j’entends sa voix « Dormez là-dessus ».
Il se réjouit sincèrement lorsque je devins la DG. Et il fut encore plus enchanté quand Florence Dupasquier fut élue présidente.
L’âge avançant, il vint de moins en moins à la Fédération, puis plus du tout. Il appelait pour ma fête et mon anniversaire (c’est-à-dire deux jours de suite) avec sa voix vive et son esprit aiguisé. Il s’inquiétait encore du sort des entreprises de transport et de l’avenir du secteur, et évidemment de la Fédération.
Si cet hommage prend un tour très personnel, je l’assume complètement. On ne croise pas beaucoup de personnes de cette envergure dans une vie.
Quels que soient les horizons nouveaux où vous vous trouvez cher Georges, je boirai une piscine de champagne en votre souvenir. Et saluez René Petit de notre part.
Florence Berthelot