
Financer le rail sur le dos des transporteurs routiers ? Une ligne rouge pour un secteur déjà exsangue
-Les Organisations Professionnelles FNTR, Union TLF et OTRE réagissent aux propos de Jean-Pierre Farandou, président-directeur général de la SNCF. Il a évoqué plusieurs pistes de financement pour l’entretien du réseau ferroviaire. Parmi elles : une « éco-contribution » des poids lourds, visant — selon ses termes — principalement les camions étrangers en transit.
Un secteur exsangue : impossible de supporter un euro de plus
Le transport routier français a les marges les plus faibles d’Europe et traverse une crise sans précédent. En aucun cas les transporteurs ne peuvent supporter une charge supplémentaire.
Rappelons qu’à la suspension de l’écotaxe en 2014, ils ont déjà absorbé, au titre du « solde de tout compte », une hausse de fiscalité de 4 centimes par litre de gazole, soit 600 millions d’euros annuels.
À chaque fois que les charges des transporteurs augmentent, ce sont les Français et les industriels qui paient, ou des emplois qui sont détruits.
Un secteur asphyxié par la fiscalité et les normes, déjà en concurrence déloyale
Le transport routier de marchandises supporte plus de 4 milliards d’euros de fiscalité spécifique par an. La France est le seul pays européen à disposer de 9 200 km de réseau autoroutier concédé payant : les poids lourds, qui représentent 15 à 20 % du trafic, génèrent 33 % des recettes.
Ajoutons à cela l’instabilité réglementaire, la multiplication des normes, et la concurrence étrangère, qui agit souvent dans des conditions sociales et fiscales bien plus favorables.
Une provocation sur le fond comme sur le droit
La proposition de cibler uniquement les camions étrangers est juridiquement inapplicable. Le droit européen impose une égalité de traitement entre les transporteurs : en pratique, ce sont les entreprises françaises qui paieront.
Le vrai objectif de cette sortie ? Remettre sur la table, en douceur, un projet d’écotaxe généralisée. Nous n’en voulons pas.
Affaiblir la route, c’est compromettre le rail et freiner le verdissement
Le développement du fret ferroviaire ne se fera pas contre le transport routier, mais avec lui. La seule filière ferroviaire en croissance aujourd’hui est le transport combiné, qui repose précisément sur une articulation entre rail et route.
Taxer davantage les camions, c’est pénaliser le transport intermodal, ralentir le report modal, et freiner le verdissement du secteur, en limitant la capacité d’investissement des entreprises dans des solutions plus propres.